Comme l’activité humaine bouleverse notre environnement à grande vitesse, la notion de risque est au cœur de la réflexion écologique. L’homme met en œuvre des techniques de plus en plus complexes qui fragilisent nos sociétés, techniques qui sont devenues plus sûres mais certaines nous exposent à des risques aux conséquences incalculables sur le long terme.

Ainsi, avec la catastrophe de Fukushima, un enchaînement « improbable » d’événements naturels a révélé des fragilités technologiques « inimaginables » auparavant : les cœurs de 3 réacteurs ont fondu et, jusqu’en 2012 au moins, la situation sera imprévisible et à haut risque. On le voit, les atteintes à l’environnement s’accompagnent de nouveaux risques, diffus, imperceptibles ou différés. De même, les pratiques productivistes réduisent pour longtemps la fertilité des sols et la capacité même de l’humanité à se nourrir, aspect souvent occulté par l’augmentation immédiate des rendements. La réduction généralisée de la biodiversité, elle, n’est pas perçue au quotidien, mais aura probablement des conséquences graves.

Notre connaissance des effets des substances nocives à faible dose et de leurs interactions, est médiocre ; notre système d’évaluation de ces risques est soumis à des conflits d’intérêt et les méthodes d’analyses sont souvent biaisées. L’exemple du Médiator a fait comprendre ces lacunes au grand public et il en est de même pour les OGM. La compétition économique conduit tout droit, si l’on peut dire, au « principe de négligence » ! Vivons-nous dans un monde plus dangereux ou jouons-nous à nous faire peur ?

Certains nous sermonnent au nom du progrès ou de pseudo-vérités statistiques. « Il n’y a pas de risque zéro et nous vivons plus longtemps » entend-on souvent. Claude Allègre n’hésitait-il pas à déclarer, au lendemain de Fukushima, qu’ « en fin de compte le nombre de morts dû au nucléaire restait infime » ? Jusqu’au jour où l’on se retrouve dans la situation des habitants de Fukushima, les statistiques avaient raison ! Qui pourrait juger « statistiquement acceptable » que le vignoble bordelais soit irradié pour des décennies ? Que les châteaux de la Loire deviennent inaccessibles ? Que la centrale de Nogent-sur-Seine (à moins de 100 km de chez nous) ait des incidents à répétition ?

Nos sociétés, à cause même de leurs puissances technologiques ultra-complexes sont devenues fragiles. A l’image d’Icare, nous nous approchons du soleil au risque comme lui, de voir brûler nos ailes et chuter. Une profession peu connue, celle d’actuaire, dont le rôle consiste à calculer le montant des primes d’assurance en fonction des risques, garde les pieds sur terre : elle constate le changement climatique et refuse d’en assurer les risques. Les risques liés aux OGM ou aux centrales nucléaires ? Elle refuse de les assurer car leurs conséquences sont incalculables. Les actuaires ne croient donc pas Claude Allègre et ils ont raison.

Le CA de l’ADEMUB

ADEMUB iNFOS n°42 Juin 2011 Édito