Nous avons découvert, dans la dernière édition de « Paroles », que, sans concertation préalable aucune, nous allons bientôt devoir côtoyer une centaine de trottinettes électriques dans les rues de notre ville. On peut avoir quelques craintes quand on sait le danger potentiel de ce type de véhicule partout, voire même un peu n’importe où, dans la ville, et sans doute trop souvent sur les trottoirs. Là où elles circulent, on doit déplorer pas mal d’accidents, dont les conséquences peuvent être graves (40% de traumatismes crâniens). Les chirurgiens orthopédistes des hôpitaux parisiens en savent quelque chose.
Devant cette déferlante désordonnée dans nos villes, il a bien fallu prendre une règlementation. Un décret ministériel du 23 octobre 2019 a mis un peu d’ordre là-dedans. Désormais, les trottinettes électriques -et autres engins de déplacement personnel – sont soumises au code de la route. Elles doivent être munies de freins, de lumières et réflecteurs (catadioptres), et d’avertisseurs. On peut les utiliser à partir de 12 ans. Elles ne doivent rouler ni sur les trottoirs, ni sur les places, ni dans les aires piétonnes (sauf à l’allure du pas). Elles ne peuvent pas prendre de passagers. Leur place est obligatoirement dans la rue et sur les bandes et pistes cyclables, lorsqu’il y en a. Et leur vitesse est limitée à 25 km/h, tout comme pour les vélos, ce qui est déjà trop.
Mais il y a un hic : le casque n’est pas obligatoire, une grave erreur du législateur.
Comment cela va-t-il se passer à Brétigny ?
Il s’agit, nous dit-on, d’une expérimentation. Cela ne coûterait, d’ailleurs, rien à la Ville. Tout sera pris en charge par la société BIRD, qui arrive avec son projet tout ficelé. Et, on a, semble-t-il, pris toutes les précautions. Ainsi, la vitesse sera limitée à 20km/h. Limitation qui nous semble difficile à faire respecter ( Qu’en sera-t-il, par exemple, dans la descente de la rue Pierre-Brossolette ?). Seuls les adultes (à partir de 18 ans) pourront participer à l’aventure. Et le casque ne sera, bien sûr, pas obligatoire, mais fortement recommandé. Et chacun fera bien ce qu’il voudra.
Concrètement, les cent trottinettes seront progressivement déployées et réparties sur l’espace public en une soixantaine de points d’attache obligatoires, jamais plus de 3 ou 5 engins ensemble, sauf à la gare où on en comptera 10. Chaque soir, une camionnette électrique ou au gaz naturel viendra ramasser les trottinettes pour les transporter en un centre où elles seront rechargées, et retour sur le site le lendemain matin. Tout sera géré à distance sur la base d’un système de géolocalisation. Les abonnés, munis de leur portable ou de leur tablette, disposeront d’un code qui leur permettra de prendre une trottinette à l’une des 60 stations. A l’issue de leur course, ils déposeront le véhicule à l’une de ces stations avec, comme preuve de leur dépôt, une photo de l’engin envoyée à la centrale. Faute de quoi, le compteur continuera de tourner jusqu’à l’accomplissement de cette obligation. Toute négligence en ce domaine pourrait, de ce fait, entraîner le paiement d’une facture élevée.
Que pense l’ADEMUB de cette opération ?
Première critique, la trottinette, de par ses caractéristiques : station debout (il en existe aussi avec siège), faible confort et dangerosité, peut tout au plus représenter un mode de déplacement complémentaire pour les courtes distances. Un effort important doit cependant être consenti par les autorités en matière de pédagogie et de sécurité.
Mais son défaut majeur réside dans son bilan carbone global, de la fabrication à l’exploitation, qui n’est pas bon. Selon une étude réalisée sur l’expérience parisienne de location de trottinettes en « free floating » par la société ARCADIS et destinée à l’usage des collectivités publiques, « la trottinette électrique émet autant de CO2/km/passager que la voiture automobile avec 3 passagers » . Cependant, il est possible, en prenant certaines mesures sur tout le parcours de vie du véhicule (une plus grande exigence dans le cahier des charges, l’allongement de la durée de vie et l’optimisation des conditions d’exploitation), il est possible d’améliorer ce bilan. Il semble que la société BIRD a pris en compte, au moins partiellement, ces recommandations d’Arcadis, et que la ville de Brétigny a posé certaines exigences dans le contrat de service. Mais nous aurions aimé pouvoir, en connaissance de cause, donner un avis circonstancié sur la teneur de ce projet.
En conclusion :
Nous formulons un avis plutôt défavorable à cette expérimentation. Car la véritable alternative au tout-automobile régnant encore dans notre ville, c’est le vélo, sous toutes ses formes et avec ses nombreux usages. C’est, en zone urbaine et périurbaine, le mode de déplacement le plus sain, le plus économique et le plus écologique (avec la marche à pied, bien sûr). Bref, c’est le véhicule de l’avenir. C’est pourquoi l’essentiel des efforts à consentir pour sortir notre ville et notre communauté d’agglomération du tout-automobile, doit porter sur le vélo : aménagements de voirie, mesures de priorisation, stationnements sécurisés et abrités, sites de prêt et de location, d’entretien et de réparation, informations et formation (prioritairement dans les écoles), manifestations publiques, etc.