On constate, depuis plusieurs années, un développement rapide en agglomération d’un nouveau type de voies appelées « voies vertes ». De quoi s’agit-il ? Comment expliquer ce phénomène ? Que faut-il en penser ?

Remontons un peu plus dans le temps. Avec le développement des déplacements cyclistes dans nos villes, on a vu progressivement se transformer un peu partout les trottoirs, destinés pourtant aux piétons qui en ont de par la Loi l’exclusivité, d’abord en « pistes cyclables », avec une partie de plus en plus congrue laissée aux piétons. L’objectif en était clair : la chaussée étant, « par définition », réservée à l’usage exclusif des véhicules automobiles devenus de plus en plus nombreux, les vélos en ont été automatiquement exclus et relégués sur le trottoir. Cela ne coûtait rien : juste un peu de peinture pour la séparation, même sur un espace étroit, et le tour était joué. Tant pis pour les piétons… et les cyclistes !

Certains trottoirs, un peu plus larges, se sont vus transformés en « pistes cyclables » avec un aménagement éventuellement un peu plus sophistiqué (séparation des deux catégories d’usagers, revêtement différent, pictogrammes…), les piétons restant toujours relégués sur le côté sous la menace des comportements imprévisibles de certains cyclistes rendus plus dangereux par le différentiel de vitesse. C’est l’aménagement que l’ADEMUB préconisait naguère, faute de mieux, en exigeant cependant une largeur minimale correcte : 3 m pour la piste cyclable bidirectionnelle et 1,40 m pour le trottoir, ce qui n’est pas souvent possible en raison du gabarit insuffisant des rues.

Ce type d’aménagement a subi de plus en plus de critiques, notamment de la part des piétons (cf. association « 60 millions de piétons »). D’autant plus qu’ils étaient considérés comme trop coûteux. Les maires rechignaient donc à prévoir une ligne budgétaire supplémentaire pour ce type d‘aménagement. Le vélo n’est pas leur priorité en la matière.

Ste Geneviève-des-Bois, avenue Léo Lagrange : le trottoir existant a été transformé en voie verte sur environ 200 m

Jusqu’au jour où est apparue la « solution miracle » et pratiquement gratuite : la voie verte. Il suffit de planter aux deux extrémités d’un trottoir, quelle que soit sa longueur, les panneaux C115 et C116, en abaissant éventuellement le niveau du trottoir aux deux extrémités, et le tour est joué.


Et, pour tenter de le rendre un peu plus acceptable aux yeux des critiques, on a trouvé des subterfuges consistant, par exemple, quand cela est possible, à élargir un peu le trottoir pour y implanter une bande de verdure en bordure. « Pourquoi protester ? » nous dit-on. « On y a mis du vert, il s’agit donc bien d’une voie verte. »


Sur cette pseudo voie verte, les cyclistes sont obligés de mettre pied à terre pour laisser libre l’entrée des voitures au parking, alors que les piétons jouissent de la priorité sur les véhicules entrants ou sortants. Bien entendu, cette injonction abusive n’est jamais respectée.







St Michel-sur-Orge, rue Berlioz : même transformation du trottoir en voie verte, alors que les cyclistes roulent en toute sécurité sur la chaussée contiguë en zone 30.









Une fois de plus, les piétons de tous âges, handicapés, PMR, se voient obligés de marcher au milieu des cyclistes en craignant à tout instant d’être renversés par un excité qui déboule à toute allure. Et, malheureusement, nos édiles, qui ont autorisé ce type d’aménagements, ne sont pas prêts à sanctionner de tels comportements.

Or, répétons-le :

LE TROTTOIR N’EST NI UNE PISTE CYCLABLE NI UNE VOIE VERTE

LE VÉLO EST UN VÉHICULE. SA PLACE EST DONC, SAUF EXCEPTIONS (cyclistes de moins de 8 ans), SUR LA CHAUSSÉE, AMÉNAGÉE POUR UNE CIRCULATION APAISÉE ASSURANT AINSI LA SÉCURITÉ DE TOUS.

L’IMPLANTATION de voies vertes EST POSSIBLE ET SOUHAITABLE ESSENTIELLEMENT HORS AGGLOMÉRATION. Seules exceptions en zone urbaine : dans les parcs et grands espaces arborés.

D’autres images illustrant notre propos :

Entrée rue Henri Douard

Brétigny-sur-Orge, piste cyclable et cheminement piéton contigu en traversée du parking Jules Verne. La présence, à l’entrée rue Henri Douard, d’un panneau voie vertte C115 est non conforme, ce d’autant plus qu’à l’autre extrémité (sortie rue Mendès France), c’est bien le panneau correct C113 pour piste cyclable qui a été implanté (en entrée et en sortie).

Sortie rue Mendès-France



















Arpajon, avenue Aristide Briand : l’erreur est flagrante, puisqu’on a tout simplement changé un trottoir de quelque 500 m en voie verte simplement en y implantant le panneau C115, ce qui n’a rien à voir.





Conclusion : toutes ces signalisations abusives sont illégales.

Qu’est-ce qu’une Voie verte ?

« Une voie verte est une route exclusivement réservée à la circulation des véhicules non motorisés, des piétons et des cavaliers » (article R 110-2 du Code de la route – décret du 16 septembre 2004). L’article R 412-7 précise que les conducteurs de véhicules motorisés ne doivent pas circuler sur une voie verte. L’arrêté du 11 juin 2008 définit le panneau « voie verte » de nomenclature C115.

Réglementairement, une voie verte n’est ni une véloroute, ni une aire piétonne, ni une piste cyclable, ni un trottoir. La notion de route indique qu’il s’agit d’un espace ayant son emprise propre hors route traditionnelle. Les voies vertes sont, par définition, bidirectionnelles et ont une largeur en milieu urbain de 3 à 5 m selon la fréquentation attendue, et de 2,5 à 3 m hors agglomération.

Concrètement, on ne peut transformer en voie verte un trottoir jouxtant une chaussée.

Source : Association 60 millions de piétons